Pourquoi c’est moi qui dois changer?

Personne se demandant si elle doit changer

Pourquoi c’est moi qui dois changer ?

Voilà une question qui revient régulièrement dans mon cabinet, assortie d’un sentiment d’injustice, voire d’un mouvement d’énervement. En clair : « c’est pas juste, c’est les autres qui se conduisent mal et c’est moi qui dois changer ».
Ma première réponse c’est que c’est vous qui êtes dans mon cabinet, pas les autres dont vous vous plaigniez. Donc a priori c’est vous qui voulez changer.
Et aucune séance de thérapie ou de coaching ne fera changer des personnes qui n’y participent pas.
Quoi que…

Changez tout en vous changeant vous

En réalité, si vous changez, votre entourage va changer. Vous faites partie de systèmes que vous créez avec vos proches, vos collègues, votre famille. Il est possible que vous ayez des rôles, et donc des comportements, différents dans chacun de ces systèmes, pour lesquels vous êtes une pièce du mécanisme. Et si on change le fonctionnement d’un élément, on change par conséquence le fonctionnement de l’ensemble. Donc votre changement provoque le changement d’autrui. De façon certaine.
Pour vous le prouver, vous pouvez le tester sur de petits échantillons quotidiens. Et observer par exemple comment votre calme bienveillant ou votre approbation peut transformer une furie en agneau.
J’en ai – et je n’en suis pas fière – fait l’expérience ce matin : un bac de fleurs posé sur le rebord de ma fenêtre est tombé sur le trottoir. Vous imaginez ma terreur d’avoir blessé quelqu’un, doublée de honte d’avoir posé là ce bac (ça ne devait être que pour quelques minutes mais c’était encore trop). Je cours dans la rue constater les dégâts (bien heureusement inexistants, si ce n’est mon bac fracassé sur le trottoir et son contenu répandu) et je me trouve face à un monsieur furieux (il était dans le magasin d’en face, n’avait pas été touché, mais était choqué par l’évènement) qui s’adresse à moi avec beaucoup d’agressivité et entreprend de me donner une leçon de civisme. Évidemment, j’aurais pu être tentée de demander à ce monsieur de se mêler de ses affaires, moyen certain d’envenimer les choses.
Comme j’ai quelques notions de communication non violente, je choisis d’abonder dans son sens et lui confirme que je suis impardonnable (ce que je pense vraiment). Un peu déçu de devoir si vite renoncer à cette mini-bagarre facile à gagner, d’autant plus qu’il avait un petit public tout acquis à sa cause, il continue sur sa lancée. Et moi sur la mienne. Je continue de confirmer qu’il a entièrement raison, et je lui demande même de m’expliquer ces lois auxquelles il fait allusion dans sa démonstration de ma culpabilité. Le voilà qui change de ton et m’explique doctement mais aimablement les dispositions légales concernant les bacs de fleurs aux fenêtres. J’abonde, le remercie de m’éclairer. Ce monsieur furieux 90 secondes plus tôt finit par me sourire gentiment et me souhaiter bon courage pour le nettoyage du trottoir. Et il n’est pas exclu que son petit triomphe intérieur lui tienne chaud toute la journée, et qu’il en soit plus aimable avec ses congénères.

Cette petite anecdote pour vous dire le pouvoir de notre comportement sur les autres. J’avais le choix de rendre ce monsieur ivre de rage ou de le calmer. Et croyez-moi, il y a quelques décennies, j’aurais attisé son excitation et toute la rue nous aurait entendus!
Alors à la question : « pourquoi c’est moi qui dois changer ? », la réponse est : « parce que c’est comme ça que vous changerez les autres ». Et que vous serez en paix.

Il ne s’agit pas pas devenir un autre

Vient alors généralement une deuxième sorte de protestation : « mais je suis comme ça, c’est ma personnalité, je ne peux pas changer ». Apparaît là la crainte légitime de se perdre, de n’être plus soi.
Légitime mais erronée à mon sens. Le changement ne peut se faire que parce que vous le voulez. Et c’est bien vous qui le voulez. Une part de vous en tout cas. Une part de vous qui en a assez d’être tout le temps en lutte, ou invisible, ou triste, ou autre chose encore.
Car nous ne sommes pas d’un bloc. Nous nous sommes développés par à-coups, sous l’influence de personnes et d’évènements, et ceux qui ont déjà travaillé avec moi savent comme l’on peut avoir à l’intérieur de soi des éléments de personnalité très opposés, ou à tout le moins différents. Et comme certains de ces éléments, quand ils se mettent en travers du chemin de notre épanouissement, peuvent être assouplis, parfois jusqu’à disparaître. Et c’est ainsi qu’en avançant en âge, avec un peu d’attention, nous pouvons nous défaire de ce qui ne nous sert plus et ne garder que le bon (pour nous).
Et nous sommes toujours nous. Plutôt que de nous perdre, nous nous sommes trouvés.

Ne pas changer est absurde

Parce que, et c’est le troisième élément de cette réflexion, cette identité que nous croyons fixée est en réalité fluctuante. Bien sûr il y a un terrain qui ne change pas, que j’appelle avec l’ANC* les « personnalités primaires ». Mais sur ce terrain, bien des comportements sont venus prospérer au fil du temps pour nous permettre de nous adapter à ce qui nous arrivait. Comportements qui se sont installés pour toujours et que nous avons tendance à confondre avec notre identité. Or ils sont souvent devenus inutiles avec le temps, et ne sont qu’une sorte d’excroissance de nos personnalités primaires. Ce n’est pas parce que certains évènements de la vie nous ont imposé d’être méfiant/agressif/discret/… que nous sommes de nature méfiante/agressive/discrète/… et que cela définit qui nous sommes. Il s’agit de stratégies adaptatives inconscientes. Devenir adulte c’est savoir se défaire des stratégies devenues inutiles.

Nous changeons parce que tout, absolument tout, change. C’est la loi de l’impermanence. Notre corps change, les gens autour de nous changent, la nature change, la langue que nous parlons change, les idées changent, même les convictions scientifiques changent. Et nous voudrions, nous, être l’unique chose à ne pas changer ? Ne pas changer de comportement, d’idées, d’apparence, de croyances, de goûts ?
Vous sentez l’absurdité ?

Puisque le changement est la loi de la vie, autant choisir lequel nous avons envie d’initier.

Pour cette rentrée, je vous souhaite de prendre les commandes de votre changement et de jouir de la richesse de cette expérience!

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