Parce que le temps change, nous avons besoin de trouver ou retrouver des ressources parfois oubliées.
Le temps donc a changé. Pour certains, ceux qui sauvent nos vies, il est devenu une terrifiante course contre la montre. Mais une course très longue. Pour d’autres, une course moins vitale mais très importante pour permettre aux entreprises de continuer de fonctionner et à nous tous d’avoir toujours des banques, des pharmacies, des légumes et de la viande (ayons au passage une pensée pour les agriculteurs, les maraîchers, les bouchers – le mien ne dormait que 4h par nuit la semaine dernière) et de l’internet !
Et puis, pour nombre d’entre vous qui me lisez (les autres n’en n’ont pas le temps, savourez ce luxe), le temps est devenu un étranger. Passée l’inquiétude de rester si longtemps enfermés, malgré ces 45 jours portés par la rumeur qui pour une fois aura sans doute raison, malgré les nombreuses occupations dont nous avions un peu perdu le goût, le temps semble décidé à passer vite. Pourtant, cette pause dans le temps, ces quelques mois qui dans les livres d’histoire ne porteront guère de dates, à part peut-être celles des entrées en confinement des pays, les uns après les autres, cette pause donc est source de beaucoup d’anxiété. Ce qui n’aura pas lieu risque d’être remis à longtemps, des projets semblent fondre, études, recherche d’emploi, de logement, tout ce qui devait connaître une nouvelle étape ce printemps est compromis … pour l’instant.
Alors je voudrais vous proposer de renouer les liens d’amitié avec le temps. Parce qu’il est toujours gros d’évènements encore embryonnaires et parce qu’il enfantera sûrement de très belles choses. J’emploie à dessein cette métaphore : il faut du temps pour « fabriquer » un enfant, de la patience, un peu de sagesse, et surtout de la vie. Vivre va suffire. Il en sortira quelque chose, et ce n’est pas parce que nous ne savons pas quoi qu’il faut s’en inquiéter. Et je vous engage à partir du principe, pas plus sot que l’inverse, que ce sera mieux que ce qui vous attendait « avant ».
Pour vous accompagner, découvrez ou redécouvrez un extrait de ce merveilleux poème de Paul Valéry qui vous incite à la patience, parce qu’ elle portera ses fruits (« chaque atome de silence est la chance d’un fruit mûr »). Il s’agit d’une palme sur laquelle mûrissent lentement des fruits (des dattes sans doute) :
« Ces jours qui te
semblent vides
Et perdus pour l’univers
Ont des racines avides
Qui travaillent les déserts.
La substance chevelue
Par les ténèbres élue
Ne peut s’arrêter jamais
Jusqu’aux entrailles du monde,
De poursuivre l’eau profonde
Que demandent les sommets.
Patience, patience,
Patience
dans l’azur !
Chaque atome de silence
Est la chance d’un fruit mûr !
Viendra l’heureuse surprise :
Une colombe, la brise,
L’ébranlement le plus doux,
Une femme qui s’appuie,
Feront tomber cette pluie
Où l’on se jette à genoux ! »[1]
Vous avez déjà fait 7 exercices (à retrouver ici à partir de « rien ne dure » posté le 17 mars). Vous en avez sans doute attendu un changement immédiat, et il est probable qu’il y en aie eu de petits. Mais il faut du temps aux choses. Un processus se met en place, qui, comme les racines du palmier, « travaille les déserts ».
Alors si vous avez l’impression de traverser un désert, si ces jours vous semblent vides et perdus pour l’univers, et même sinon, faites l’exercice suivant :
Exercice N°8 : Trouvez votre ressource profonde
Visualisez[2] vos racines qui, comme
celles du palmier, vont chercher l’eau dans la nappe phréatique.
Ensuite demandez-vous quelle est cette ressource profonde mais toujours
présente en vous, que vous allez chercher patiemment.
Visualisez-là, au plus profond de vous.
Elle est la base de qui vous êtes. Elle est mouvante, complexe, elle est
peut-être difficile à nommer (je vous y aiderai plus tard), mais elle a une
forme, une couleur, une température. Vous la voyez, vous la sentez.
Vous êtes désormais en confiance. L’avenir se fera.
Patience
dans l’azur
…
[1] PALME est le dernier poème du recueil CHARMES de Paul Valéry
[2] Quand j’écris « visualisez » ou « sentez », comprenez qu’il s’agit d’une véritable action. Il faut vous arrêter de lire et créer l’image – ou le film -. Il faut que vos neurones visuels et sensoriels se mettent en action, de la même façon que si la chose avait lieu réellement.